la commissure des sèves
Jésus est confiné !

Jésus n’avait pas tout prévu. Ou si. Mais là, personne ! Personne pour l’arrêter, pour le soumettre à ces questions étranges et racistes. Personne pour le déporter sur le tarmac des solitudes, pour le flageller et le fouetter. Une croix, c’est lourd. Mais là, elle reste dans l’entrepôt. Pas de livraison. Pas de soldats motivés. Pas de lance, de blessure infâme. Il crie : c’est mon vendredi, quand même ! Et il entend comme unique réponse : tu es seul comme Robinson. Une voix caverneuse rit : encore une crise de Defoe ! Où est Marie ? Elle pleure, mais à la maison. Et Véronique ? En chambre noire. Et Marie de Magdala ? Enchaînée par les forces de l’ordre. Bas les masques ! Non, Jésus, tu ne peux pas vociférer et lancer des slogans inacceptables. Mais c’est Vendredi saint ! C’est vrai, mais tu es un peu chocolat. Les membres d’un groupe de pharisiens, blottis dans l’ombre à un mètre les uns des autres, s’esclaffent. Sans oublier le centurion qui murmure, il y a quelque chose qui cloche. Mais c’est mon heure ! Tu l’as mis où ton gilet ? Parce qu’il y a pas plus tard que trois mois, tu ne voulais plus la rejouer, la scène de la crucifixion. A force de revendiquer on finit à la rue. Ou sur les cailloux. Tiens, à propos de cailloux, tu ne deviendrais pas un peu chauve ? Chauve, moi ! C’est rien, souris. Vos plaisanteries à trois Sesterces, vous pouvez vous les garder. Sesterces ? Je vois l’avenir. Et votre disparition.

Jésus a découvert la trahison. Et le sens du choix. Ou il va jusqu’au bout de son histoire. Ou il reste dans sa grotte en attendant la fin du confinement.

Pauvre Jésus.

Son blouson rouge est à vendre aux enchères. Rome veut lui faire payer le bois et les clous.

Tout va mal chez les Dieux.